Originaire de Belgique, Philippe Dulieu vit sa jeunesse en Bourgogne. Après avoir suivi des études supérieures (maitrise et thèse) en biochimie à Lyon, il décroche un poste de maître de conférence en biochimie et biologie moléculaire à l'université de Franche-Comté à Besançon.
En 2002, il décide de quitter l'enseignement pour lancer sa société, accompagné de deux anciens élèves "brillants" Jean-Luc Schlick et Jean-François Musard.
"Je suis un passionné de technologie et bien sûr des sciences de la vie puisque c'est l'origine de ma formation. Lorsque j'ai pratiqué pendant 12 ans l'enseignement et la recherche en tant que fonctionnaire, j'avais envie de voir autre chose et j'avais envie d'une carrière dans le privé. Mon envie et mon goût pour l'indépendance m'ont poussé à créer une société, voilà comment je me suis retrouvé à la création de RD-Biotech", nous raconte Philippe Dulieu.
Aujourd'hui, après 19 ans d'existence, RD-Biotech à Besançon compte une trentaine de salariés. Depuis sa création, Philippe Dulieu et ses associés ont fondé le groupe Biotech Investissement qui a racheté la société Diaclone basée à Besançon. D'autres sites sont implantés à Lyon et en Belgique, ce qui représente un groupe de 80 collaborateurs au total.
Quelle était votre ambition lorsque vous avez créé RD-Biotech ?
Philippe Dulieu : "Je travaillais dans une PME avant d'enseigner à l'université et j'ai gardé le goût de l'échange et j'étais depuis longtemps intéressé par vendre des choses parce que c'est vraiment le nerf de la guerre, même si on fait de la technologie, il faut arriver à la vendre. C'est le mix de ces deux points qui a fait qu'on s'est décidé. La mayonnaise a bien pris, ça a mis quelques années, mais aujourd'hui ça a bien pris."
Avec la création d'une nouvelle unité de production d'ADN, quels sont vos objectifs ?
"Depuis son démarrage et de plus en plus, RD-Biotech consacre son activité à faire ce qu'on appelle de la bioproduction : c'est-à-dire que l'on produit des biomolécules, en particulier des anticorps, mais aussi de l'ADN pour des phases de recherche et de développement de nouveaux médicaments. C'est ce qu'on appelle des thérapies innovantes, des médicaments biothérapeutiques, issus d'ingénierie moléculaire pour la plupart.
Le projet que nous avons mis en place avant la crise de la Covid-19, c'est d'être capable un jour de produire de l'ADN avec un grade BPF qui nous permettra d'accéder non plus seulement au marché de la recherche, mais au marché de la production d'ingrédients pharmaceutiques.
L'ADN, c'est une empreinte, c'est une matrice qui va servir à la fabrication de l'ARN et notamment des vaccins contre la Covid.
En mars 2020, on a été les sous-traitants de l'entreprise BioNTech, la première avec Pfizer, à avoir mis sur pied un vaccin et aujourd'hui, tout le monde cherche à avoir un vaccin Pfizer. On a été dans les phases préliminaires de recherche pour les aider à développer ce vaccin-là.
Ca veut dire que pour nous, le futur de RD-Biotech sera non pas de produire ou développer des vaccins, mais de produire des molécules essentielles à l'élaboration de futurs produits thérapeutiques.
Ça concerne effectivement les vaccins Covid parce qu'on en parle beaucoup, mais aussi d'autres vaccins anti-cancer puisque nous sommes impliqués dedans depuis une dizaine d'années avec nos clients, les projets de thérapies cellulaires, de thérapie génétique, etc.
L'ADN c'est la molécule de départ, c'est la fondation de ce genre de projets thérapeutiques. On a besoin d'ADN pour faire de nouveaux produits thérapeutiques et actuellement, il y a un fort manque de capacité de production au niveau mondial, il y a peu d'entreprises capables de produire de l'ADN.
Notre projet a été soutenu par France Relance parce qu'on est les seuls en France à produire de l'ADN plasmidique.
On a beaucoup de demandes pour aider nos clients à entrer, soit en phase clinique pour étudier la viabilité et développer de nouveaux traitements, soit des productions commerciales, l'objet de cette nouvelle unité. C'est-à-dire qu'une fois que le vaccin Covid est sur le marché, il faut produire cette matière ADN pour chaque lot de vaccins. C'est comme la farine et le pain : sans farine, on ne peut pas faire de pain.
Puisqu'il n'y a pas de capacité de production en France et qu'elle est très faible en Europe, ça fait un boulot d'étranglement pour de nombreux projets qui sont en attente de laboratoires capables de produire. Aujourd'hui, les capacités sont tellement mobilisées sur les vaccins Covid, que les autres projets sont en stand-by en attendant d'avoir des créneaux de production.
Ce plan de relance a conforté notre projet puisqu'on sait que la demande est très forte et elle est amenée à augmenter dans les prochaines années."
Cette nouvelle unité nécessite l'embauche de 15 personnes au départ et 50 dans les cinq prochaines années en fonction de la charge de l'activité. RD-Biotech va investir 7 millions d'euros sur ce projet ADN BPF.
RD-Biotech va emménager dans un nouveau bâtiment à Témis Santé à Besançon… Vous pouvez nous en dire plus ?
"La société connaît une forte croissance d'activité en 2020 notamment grâce à la production de vaccins, mais pas uniquement contre le Covid, ça englobe tous les projets de nouvelles thérapies pour lesquelles nous sommes concernés dans nos activités.
En plus de ce nouveau projet d'unité de production d'ADN plasmidique qui verra le jour en 2022, RD-Biotech va emménager dans de nouveaux locaux dans environ deux mois. On a construit un nouvel immeuble dans la zone Témis Santé qui est presque fini. La livraison du bâtiment est prévue fin mars pour un emménagement début avril 2021. Ces nouveaux locaux vont nous permettre d'augmenter significativement notre capacité de production."