Après deux ans et demi de travaux, la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise (Ciase) depuis 1950, présidée par Jean-Marc Sauvé, va dévoiler son rapport et ses nombreuses annexes, une somme qui atteint finalement "2.500" pages, selon ce dernier.
Le rapport Sauvé estime à 216.000 le nombre de personnes de plus de 18 ans ayant fait l'objet de violences ou d'agressions sexuelles pendant leur minorité de la part de clercs ou de religieux catholiques en France de 1950 à 2020, selon ses conclusions rendues publiques mardi.
Le nombre de victimes grimpe à "330.000 si l'on ajoute les agresseurs laïcs travaillant dans des institutions de l'Église catholique" (aumôneries, enseignants dans les écoles catholiques, mouvements de jeunesse), a ajouté Jean-Marc Sauvé en rendant publiques devant la presse les conclusions de la commission qu'il préside.
Une quarantaine de victimes dans le diocèse de Besançon
Au micro de France Bleu Besançon, l'archevêque a déclaré : "il y a une quarantaine de victimes dans le Diocèse de Besançon depuis les années 50. Les victimes sont surtout des années 50 à 70 ça concerne une vingtaine de prêtres qui sont décédés aujourd'hui."
En 2016, le Diocèse de Besançon avait ouvert une cellule d'écoute pour les victimes d'abus sexuels dans l'Église. "Nous avons eu un certain nombre de personnes qui se sont manifestées, je les ai reçues pour les écouter. Ce qu'elles me disent surtout c'est qu’enfin, nous les écoutons –".
La cellule d'écoute reste en place
Dans un communiqué, l'archevêque de Besançon affirme que la cellule d'écoute aux victimes ouverte en 2016 reste en place : "notre porte leur reste ouverte pour un temps d’échanges, si elles en éprouvent le besoin".
La cellule d’écoute est joignable par téléphone au 06 44 14 22 88 ou par mail via le site du diocèse : www.diocese-besancon.fr
Politique de réparation
Le diagnostic fait, la Commission doit énumérer 45 propositions qui toucheront à plusieurs domaines: écoute des victimes, prévention, formation des prêtres et religieux, droit canonique, transformation de la gouvernance de l'Eglise... Il préconisera aussi une politique de reconnaissance et de réparation.
Pour ses travaux, la Ciase a fait de la parole des victimes "la matrice de son travail", selon M. Sauvé. D'abord avec un appel à témoignages ouvert dix-sept mois, qui a recueilli 6.500 appels ou contacts de victimes ou proches. Puis en procédant à 250 auditions longues ou entretiens de recherche. Elle a aussi approfondi ses recherches avec une plongée dans de nombreuses archives (Eglise, ministère de la Justice, de l'Intérieur, presse).
Dans la majorité des cas, les faits sont aujourd'hui prescrits, les auteurs décédés, rendant un recours à la justice improbable. Les procédures canoniques (le droit de l'église), quand elles sont engagées, sont très longues et peu transparentes.
Quelles suites l'Église donnera-t-elle au rapport ?
"J'attends que nous soyons confrontés à ce fardeau, aussi noir soit-il, afin que nous puissions ensuite prendre les mesures qui s'imposent", affirme Véronique Margron, présidente de la Corref.
L'épiscopat a pris les devants en promettant non pas des réparations, mais un dispositif de "contributions" financières, versées aux victimes à partir de 2022, qui ne fait pas l'unanimité chez les victimes.
Les premières réponses de la CEF et de la Corref sont attendues en novembre, date à laquelle les deux institutions se réuniront en assemblées plénières.
Le rapport sera examiné à la loupe à Rome, où la question a été évoquée par le pape François et une partie des évêques français en visite au Vatican en septembre.
Sanction d'évêques ou de prélats, visite du Pape en Irlande, organisation d'un sommet inédit en 2019 sur "la protection des mineurs", modification du droit canon...: la lutte contre la pédocriminalité est un dossier également traité au Vatican.
Créée à l'automne 2018, la Ciase est composée de 22 membres, bénévoles, aux compétences pluridisciplinaires (juridiques, médicales, psychologiques et psychiatriques, secteur social et éducatif, protection de l'enfance, histoire et sciences sociales, théologie...). Elle a été financée par l'épiscopat et les instituts et congrégations religieux à hauteur de 3 millions d'euros.
(Sources : AFP et France Bleu Besançon)