Aujourd'hui, une femme meurt tous les deux jours sous les coups de son conjoint. C'est l'une des principales raisons pour lesquelles le gouvernement a lancé le 3 septembre 2019 le premier Grenelle contre violences conjugales. Une soixantaine de propositions ont été formulées. Des annonces devraient être rendues publiques le 25 novembre à l'occasion de la journée internationale contre les violences faites aux femmes.
"On ne veut pas d'une autre opération de communication, on veut du concret"
C'est dans ce cadre que les associations du Collectif 25 novembre attendent des actions du gouvernement. "On ne veut pas d'une autre opération de communication comme il y en a eu jusqu'à présent, aujourd'hui, on attend des mesures concrètes", souligne Vanessa-Jade Parisot, porte-parole de Osez le féminisme 25.
Globalement, les associations ont besoin d'aides financières pour apporter, à leur tour, une aide juridique, morale, physique aux femmes victimes de violences de leur conjoint ou ex-conjoint. Pour Anne Peiffer, présidente du Centre d'information sur les droits des femmes et des familles du Doubs, "il faut qu'on ne s'épuise pas". Elle explique que depuis des mouvements médiatiques tels que #metoo "les demandes de rendez-vous augmentent perpétuellement". Christine Perrot, présidente de Solidarité Femmes, dit "avoir peur que faute de moyens, on ne puisse pas apporter de réponses aux victimes et qu'elles doivent de mettre en danger en rentrant à leur domicile, cela donne un sentiment d'impunité aux conjoints violents."
Pour que ces associations continuent à œuvrer dans leur domaine et développer des services, elles attendent des mesures :
Marion Goudeau, directrice du Centre d'information et de consultation sur la sexualité (CICS), souhaite que l'accent soit mis en matière de prévention pour mener des actions auprès des jeunes en milieu scolaire ou hors scolaire et des personnes en situation de handicap sur l'éducation de la vie affective et sexuelle. "Si ce type de prévention se généralisait beaucoup plus, s'il y avait des fonds pour payer plus de salariés, de gens spécialisés, dans ces domaines-là pour appuyer, ça favoriserait notre action."
Pour Osez le féminisme 25, "on souhaite que le budget d'un milliard d'euros soit atteint pour pouvoir mettre en place un parcours adéquat de sortie de toutes les violences" affirme Vanessa-Jade Parisot, porte-parole. "On revendique bien évidemment les formations obligatoires pour tous les professionnels au contact des victimes, généraliser sur tout le territoire les dispositifs de protection et d'éloignement, mais qu'ils soient efficients, efficaces et concrets."
Pour le volet justice et juridique, le Centre d'information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF) souhaite que le Grenelle "améliore les textes et notamment la prise en compte des spécificités des violences conjugales et notamment mieux définir la notion d'emprise, définir les violences économiques, prendre en compte les suicides forcés", décline Anne Peiffer. Autre revendication : "indemniser les victimes de violences conjugales sur la même base que les victimes de terrorisme, modifier l'encadrement du secret médical pour que les médecins puissent signaler des violences conjugales et assurer un repérage et un suivi des conjoints qui sortent de prison."
L'association Solidarité Femmes "souscrit à toutes ces dernières revendications" affirme Christine Perrot, présidente de l'association. Et d'ajouter : "concrètement, dans le travail que l'on fait, on accueille des femmes qui doivent porter plainte donc on a besoin de grosses améliorations sur l'accueil qui leur est réservé même si c'est en progrès pour l'instant à Besançon, il y a également un besoin de recruter et de former au niveau des services de police et de gendarmerie. Nous avons besoin que ces formations touchent tous les secteurs professionnels qui sont en contact avec les femmes, qu'il s'agisse de la police et de la gendarmerie pour les plaintes, mais aussi des médecins, des personnels de l'Éducation nationale…"
Le Mouvement du nid, qui accueille des personnes en situation de prostitution et les aide à sortir de cette situation, est représenté par Ingrid Henry, bénévole. "Nous sommes toutes des bénévoles, notre association n'a pas d'argent alors qu'il faudrait au moins un salarié à plein temps et en contrat à durée indéterminée."
Des violences "moins tolérées" qu'auparavant, mais des chiffres toujours alarmants
De temps en temps, resurgit sur les réseaux sociaux un extrait de reportage télévisé de 1975 où des hommes s'expriment sur les femmes battues. Pour certains, cette question semble grave, pour d'autres, leurs propos peuvent paraître surprenants et seraient sévèrement critiqués sur le terrain médiatique aujourd'hui.
Selon Anne Peiffer, "J'ai le sentiment que ces violences sont moins tolérées". Christine Perrot ajoute : "grâce aux efforts pour la sécurité routière, les chauffards sont devenus ringards, ce serait bien que les agresseurs le soient aussi".
Si ces violences semblent moins tolérées, les chiffres de 2019 sont loin d'être réjouissants avec déjà, au 30 octobre dernier, 134 femmes mortes sous les coups de leur conjoint en Franche-Comté. En France, ce sont 200 000 femmes qui meurent chaque année. "On peut également parler d'un viol toutes les 7 minutes en France, 1 assassinat tous les deux jours et demi, c'est dramatique", s'insurge Christine Perrot. Et ces chiffres ne tiennent pas compte des suicides forcés ou non, les dépressions, etc.
De plus, "chaque année, les violences faites aux femmes coûtent 3 milliards et demi à l'État, alors qu'on demande 1 milliard pour essayer d'en sortir", explique la présidente de Solidarité Femmes.
Un programme d'évènements jusqu'au 28 novembre à Besançon
Lundi 25 novembre
- Exposition à la faculté de Droit de 9h à 16h et mardi 26 novembre sur les "Cicatrices paroles de femmes" avec la présence de juristes à la mi-journée.
- Conférence à 17h30 avec Catherine Philippe sur le thème "Non c'est non : le consentement au niveau juridique" + débat à la faculté de Droit
- Cinéma à 20 heures : projection de "Une femme d'exception" de Mimi Leder au Mégarama Beaux-Arts avec un débat et un pot convivial après le film.
Mardi 26 novembre
- Conférence avec Alexia Boucherie d'après son livre Troubles dans le consentement puis échanges avec le public à la Maison des sciences humaines et de l'environnement à 18 heures.
Jeudi 28 novembre
- Soirée discussion sur "Le harcèlement de rue" au Pixel à 20 heures. Discussion sous forme des "caféministes" d'Osez le féminisme 25.