La Chambre régionale des comptes explique que ”concernant spécifiquement le licenciement en cours de contrat, bien que le juge administratif admette de manière constante la rupture du lien de confiance comme motif du licenciement, la lettre de licenciement doit préciser expressément le motif retenu.” Or, le motif d’Alexandre Cordier a été prononcé au motif que son projet personnel, qui était de candidater à l’élection municipale de 2020 à Besançon, était ”incompatible avec ses fonctions de collaborateur de cabinet".
De plus, ce licenciement a été réalisé trois mois avant l’échéance de son contrat. La chambre régionale des comptes affirme dans son rapport que :
- ”lorsque la fin de contrat est liée à la fin du mandat de l’autorité territoriale, le collaborateur ne bénéficie pas d’une indemnité de fin de contrat. Seule une indemnité compensatrice de congés payés peut lui être versée. Il peut prétendre aux allocations de l’assurance-chômage dès lors qu’il s’inscrit comme demandeur d’emploi et respecte les obligations prévues.”
- ”En cas de licenciement avant le terme du contrat, le collaborateur de cabinet bénéficie d'une indemnité de licenciement 3 dans la mesure où le motif de licenciement n'est pas disciplinaire. Il peut également prétendre à l'indemnité compensatrice de congés payés et aux allocations de l’assurance-chômage" ;
- ”En cas de démission, aucune indemnité de licenciement n'est possible et aucun droit n'est ouvert pour la perception des allocations pour perte d’emploi.”
Or, dans les faits, Alexandra Cordier a bénéficié d'une indemnité de licenciement d'un montant de 6.294,31 € et d'une indemnité compensatrice de congés payés de 8.064,20 € telles qu'elles apparaissent sur sa fiche de paie du mois de janvier 2020. La chambre a vérifié la régularité des modalités de calcul de ces deux indemnités. Le coût chargé pour la Ville de Besançon s'élève à 20.243,52 €.
Une demande d'indemnisation de 74.000€
Par ailleurs, l’ex-collaboratrice a sollicité une indemnisation pour perte d'emploi à laquelle la Ville de Besançon a fait droit dans un courrier du 24 janvier 2020. Dans ce cadre, elle s'est vue allouer 730 allocations journalières d'aide au retour à l'emploi (ARE) à compter du 24 février 2020 sur la base d'un montant de 96,70 € bruts (à la date du calcul). Elle a perçu l'entièreté des droits ouverts pour un montant global à la charge de la commune de Besançon de 73.893,30 € selon les états de paie annuels.
L'agent s'est portée candidate à l'élection municipale de mars 2020 et a conduit une liste à cette fin. ”Or, les collaborateurs de cabinet ne peuvent présenter librement leur candidature aux élections locales. Elle avait un statut d'agent salarié communal incompatible avec sa candidature, elle devait donc démissionner de ses fonctions pour être éligible. La loi ne précise pas le délai mais la jurisprudence considère la validité de la démission dans la mesure où elle est effective le jour de l'élection et est acceptée par l'autorité territoriale préalablement à la tenue du scrutin”, explique la Chambre des comptes.
"Des conséquences financières importantes pour la commune"
Dans l'hypothèse où elle aurait souhaité démissionner, Alexandre Cordier aurait donc dû le faire avant le 15 mars 2020 et sa démission aurait dû être approuvée par le maire en fonction avant cette date. Plutôt qu'une démission de l'intéressée, le choix de la collectivité a donc été de la licencier à moins de trois mois du terme de son contrat. ”Cette décision a eu des conséquences financières importantes pour la commune de Besançon. Le licenciement, comme vu supra, lui a permis de bénéficier d'une indemnité de licenciement et d'ouvrir des droits aux allocations-chômage. En cas de démission de l'agent, cette indemnité comme les allocations pour perte d'emploi n'auraient pas été dues”, souligne le rapport de la Chambre des comptes, soit une décision qui a coûté 82.755,06€ à la Ville de Besançon, en plus des indemnités compensatrices de congés pays de 11.381,75€.
La Chambre constate que ”l’incompatibilité entre la position de salarié municipal de l’agent et sa candidature n’était pas le fait de la commune qui n’avait pas à gérer les conséquences, notamment financières, de cette situation particulière.” Et d’ajouter : ”le choix de la procédure de licenciement a permis à l’agent de bénéficier d’avantages dont il n’aurait pu se prévaloir en cas de démission.”
Une enquête ouverte pour "détournement de fonds publics"
Le procureur de la République, Étienne Manteaux a indiqué jeudi 13 décembre avoir reçu un signalement de la procureur financière de la chambre régionale des comptes de Bourgogne Franche-Comté à ce sujet et qu’une enquête préliminaire en cours pour ”détournement de fonds publics” confiée au service économique et financier de la division criminalité organisée et spécialisée.