Inquiète de ne pas avoir de nouvelles de son compagnon, sa petite amie âgée de 32 ans avait signalé la disparition de Nolan le 22 novembre 2023 en fin de journée à la brigade de gendarmerie de Saint-Amour. Elle s’était présentée plusieurs fois au domicile du jeune homme qui aurait normalement dû être en télétravail chez lui ce jour-là à Cuisia.
Des recherches ont été faites par les enquêteurs dans l’environnement proche de la victime "qui n’était pas connue pour être dépressif " a précisé le procureur de la République Étienne Manteaux, mais aucun signe de vie n’a pu être établi ce qui a éveillé l’inquiétude des enquêteurs.
Soupçonnant qu’un tiers puisse être à l’origine de la disparition de cet homme, le parquet de Lons-le-Saunier a alors ouvert une information judiciaire auprès du juge d’instruction pour enlèvement et séquestration le 24 novembre 2023.
La femme ayant signalé la disparition de son compagnon a précisé aux enquêteurs qu’elle avait récemment déposé plainte dans une autre brigade de gendarmerie car "elle était régulièrement destinataire de courriers anonymes comportant essentiellement des mises en cause sur ses pratiques sexuelles" a détaillé Étienne Manteaux. "C’était une femme inquiète qui avait l’impression d’être surveillée" a encore ajouté le procureur avant de signaler que la ferme dans laquelle elle travaillait avait récemment subi un incendie. L’enquête en cours n’avait toutefois pas permis d’identifier qui pouvait être l’auteur de ces courriers anonymes.
Il emprunte un véhicule "avec un coffre large" pour transporter le corps
Les enquêteurs ont alors élargi le périmètre de leurs investigations ce qui a permis d’accélérer les choses puisque le 18 décembre 2023, un témoin a expliqué aux gendarmes que l’un de ses proches lui avait demandé de lui prêter son véhicule de marque Renault Kangoo "avec un coffre large" a précisé le procureur. Le prêt avait eu lieu du 21 au 23 novembre, "donc au moment de la disparition inquiétante" et cette personne aurait alors confié au témoin qu’elle avait besoin de son véhicule pour "transporter un corps puisqu’il avait tué un homme".
L’enquête a alors pris "un tour tout à fait différent" a signalé le procureur et la personne désignée par le témoin a été placée en garde à vue le lendemain, le 18 décembre 2023. L’homme, un agriculteur de 31 ans exploitant d’une ferme située à Saint-Eugène en Saône-et-Loire a admis aux enquêteurs son implication dans les faits.
Une reconnaissance qui va être "très progressive" selon Étienne Manteaux puisque "plusieurs scénarios vont être présentés par ce mis en cause". Au départ, l’homme évoque des coups mortels dans un contexte particulier. Alors qu'il avait une compagne stable entre 2019 et 2022, après la séparation il souffre de solitude et recherche "une nouvelle compagne notamment via le réseau Tinder". En mai 2023, il rencontre alors une nouvelle compagne "dont il est tombé amoureux" précise le procureur, "et avec laquelle il a eu une relation amoureuse sans que cela ne débouche sur du concubinage". Il a expliqué aux enquêteurs qu’il a "conçu un dépit amoureux certain en constatant que sa compagne était adepte du poly-amour c’est-à-dire d’avoir plusieurs partenaires amoureux mais de manière assumée et non dissimulée". Une situation qui l’a toutefois mis progressivement en colère et a mené à la rupture du couple en novembre 2023. "Période, à partir d’octobre jusqu’à la rupture, qui correspond à l’envoi des premiers courriers anonymes" reçus par cette même femme a ajouté le procureur.
Il surveillait le domicile de la victime
Au cours de sa garde à vue, l’homme a confié aux enquêteurs qu’il avait connaissance de la relation entre son ex-petite amie et Nolan Bernede et qu’il a alors "ressenti de la colère, de l’amertume de la jalousie" vis-à-vis de cette relation et a commencé à opérer une surveillance du domicile de cet homme qui la conduit à se présenter chez le Jurassien. Dans une première déclaration, il explique aux enquêteurs s’être présenté le 22 novembre 2023 au domicile de Nolan, qu’il y aurait alors eu une dispute, que le Jurassien aurait alors trébuché et qu’il se serait heurté la tête contre une pierre. Puis il va faire évoluer sa déposition lors d’une nouvelle entrevue en "admettant d’avoir commis ce qui a été qualifié par le parquet d’assassinat".
Pour le parquet il s’agit d’un homicide prémédité puisque l’homme "a pris soin de se munir d’une carabine 22 long rifle qu’il détenait" et d’emprunter le véhicule Kangoo pour lequel il a notamment fait établir de fausses plaques d’immatriculation afin qu’il ne puisse pas être identifié.
Il s’est ensuite rendu au domicile de cet homme "qui avait eu l’audace d’avoir des relations sexuelles avec celle qu’il aimait" et dit l’avoir abattu d’une balle dans la tête. Le corps a ensuite été transporté de Cuisia jusqu’à sa ferme de Saint-Eugène où il a été enterré à l’aide de l’un de ses engins agricole.
Un procédé macabre pour faire disparaître le corps
Mais alors que l’auteur présumé était entendu le 13 décembre en qualité de témoin dans le cadre de l’enquête, il prend peur et panique à l’issue de l’audition que "les enquêteurs puissent découvrir où il avait caché le corps". Il prend alors la décision de le déterrer et de le bruler pour le faire disparaitre définitivement. Le procureur a détaillé le procédé macabre : "il a donc pris une auge qu’il a placée sur un chariot. Il déclare être allé dans un champ éloigné et à l’abri des regards, avoir mis un stère de bois dans son auge, utilisé plusieurs litres de gasoil et avoir fait brûler le corps pendant près de 7 heures". Il explique encore qu’à l’issue de cette combustion il transporte les restes et les déverse dans un ruisseau "pour que tous les résidus soient dispersés". Le fort débit ne favorisera d’ailleurs pas "la découverte d’éventuels restes humains qui auraient résisté à la combustion" a précisé Etienne Manteaux.
L’arme du crime n’a, elle non plus, pas été retrouvée, l’homme a déclaré aux enquêteurs l’avoir découpée et jetée dans une rivière. Il a été placé en détention provisoire à la maison d’arrêt de Besançon à l’issue de sa mise en examen pour assassinat.
Les enquêteurs vont à présent être chargés de rechercher toutes traces permettant de corroborer les déclarations de l’individu. "C’est assez singulier de constater qu’hier après-midi alors que se clôturait le dossier Zepeda (…) à la même heure était ouvert un nouveau dossier ici au pôle d’instruction de Besançon d’assassinat sans que n’ait été retrouvé le moindre élément du corps de cette victime" a conclu Étienne Manteaux.