L'Assemblée vote l'"accès direct" des patients à des infirmiers : "un retour au XIXe siècle" selon des médecins à Besançon

Publié le 19/01/2023 - 10:01
Mis à jour le 19/01/2023 - 10:19

L'Assemblée nationale a adopté dans la nuit de mercredi à jeudi l'ouverture d'un "accès direct" des patients aux infirmiers en pratique avancée (IPA), l'une des mesures d'une proposition de loi sur l'accès aux soins vivement critiquée notamment par le collectif Médecin pour demain à Besançon.

 © Alexane Alfaro
© Alexane Alfaro

L'article premier de ce texte, voté en première lecture par les députés avec 62 voix contre 3, prévoit également la possibilité pour ces infirmiers de faire certaines prescriptions. Le statut d'IPA, créé via la loi Touraine de 2016 et un décret en 2018, avec un diplôme bac+5, vise notamment à réduire la charge de travail des médecins en élargissant les compétences de certains infirmiers sur des pathologies ciblées. Mais le déploiement de ces "infirmiers experts" est encore limité, en raison notamment d'un nombre insuffisant de patients qui leurs sont adressés par des médecins et d'une rémunération peu attractive.

L'article adopté mercredi vise à revaloriser ce statut en donnant la possibilité aux patients de se rendre directement chez ces paramédicaux sans passer en amont par un médecin, mais dans le cadre d'un "exercice coordonné" avec ce dernier.

Les députés ont aussi adopté un amendement du groupe LFI, soutenu par le gouvernement, prévoyant que le décret déterminant les modalités d'une "primo-prescription" par ces IPA devra être pris en Conseil d'Etat après avis de la Haute autorité de Santé.

"Lutter contre les déserts médicaux et améliorer l'accès aux soins"

La proposition de loi de la députée Renaissance Stéphanie Rist, dont l'examen doit se poursuivre ce jeudi 19 janvier, prévoit également d'instaurer un "accès direct" aux kinésithérapeutes et aux orthophonistes. "Ce texte répond à deux objectifs : lutter contre les déserts médicaux et améliorer l'accès aux soins", a plaidé Mme Rist.

Socialistes et communistes ont annoncé qu'ils s'abstiendraient sur le vote global du texte, jugé trop peu ambitieux pour lutter contre la désertification médicale. Les écologistes ont annoncé de leur côté un vote favorable, malgré des réserves.

"Nous conditionnons notre vote final à l'écoute que vous accorderez à nos propositions", a dit de son côté la députée LFI Farida Amrani lors de la discussion générale. Le groupe LR "sera constructif", avait indiqué la députée Justine Gruet, prévenant toutefois qu'un vote final positif sur le texte serait conditionné à la suppression de l'article sur les IPA.

"Un retour au XIXe siècle"

Les organisations de médecins s'alarment de certaines mesures du texte, qui contournent selon elles les prérogatives des praticiens libéraux. Des médecins du collectif Médecin pour demain à Besançon parlent d’une "Méconnaissance ( ou mépris ? ) totale de la part de notre gouvernement de la situation réelle de la Santé en France et de ses acteurs". Ils expliquent que cette loi est "un retour au XIXe siècle, où l'on avait créé les officiers de santé par manque de médecins, dans la seule intention de quadriller le territoire français, avec l'intention très claire que les paysans dans leur campagne sauraient se satisfaire de cela, quand les plus riches auraient toujours accès à un médecin (et à des médicaments coûteux, que l'on réservait à une élite)."

Le communiqué de Médecin pour demain

"Loi Rist sur les informiers en pratique avancée : retour aux XIXe siècle !

Méconnaissance ( ou mépris ? ) totale de la part de notre gouvernement de la situation réelle de la Santé en France et de ses acteurs : à l'heure où tous quittent le bateau, infirmier(e)s comme médecins, il ne convient pas de revaloriser les acteurs existants, mais combler les trous avec un retour au XIXe siècle : un retour en arrière où le peuple, qui devra travailler plus longtemps, aura les plus grandes difficultés à avoir accès à un médecin !

Hier soir, par 65 voix, la loi Rist a été adoptée par l'Assemblée Nationale. Cette loi permet le recours direct aux infirmier(e)s en pratique avancée, et leur donne également le droit de prescription. C'est un retour au XIXe siècle, où l'on avait créé les officiers de santé par manque de médecins, dans la seule intention de quadriller le territoire français ( on parlait déjà d'accès aux soins ), avec l'intention très claire que les paysans dans leur campagne sauraient se satisfaire de cela, quand les plus riches auraient toujours accès à un médecin ( et à des médicaments coûteux, que l'on réservait à une élite ).

Il est étonnant qu'au XXIe siècle, le même schéma se reproduise, l'élite politique reproduisant ce mépris de classe à l'encontre des français, qui devront se contenter d'un infirmier ( quand ce n'est pas un pharmacien ) en lieu et place d'un médecin ! L'Histoire n'est qu'un éternel recommencement, et c'est bien malheureux de constater cela !

Le gouvernement table sur 6.000 médecins de moins dans les années qui viennent, ces 6.000 devant donc être compensés par autant d'infirmiers. Il se trompe ! L'absence de perception de la souffrance de soignants qui n'en peuvent plus, ville et hôpital confondus, tant les infirmier(e)s que les médecins, est sidérant. D'après nos estimations, ce n'est pas 6000 mais probablement le triple qu'il faut envisager comme fuite des médecins, sans compter ceux qui seront tentés par un déconventionnement !

Actuellement, 1 médecin généraliste sur 5 a plus de 65 ans : cela fait plus de 11.000 ! Parmi ceux qui sont installés, certains commencent à jeter l'éponge et quittent le monde libéral. Cela sera accéléré par le mépris affiché par le gouvernement, et ce seront là encore plusieurs milliers de médecins, pour beaucoup des femmes ( qui sont le plus souvent insultées, voir menacées dans leur pratique quotidienne : c'est toujours plus facile de s'en prendre à elles ! ), qui partiront dans le salariat, ou à l'étranger, ou encore pour certains feront carrément autre chose, le tout étant de préserver sa santé mentale et ne pas aller vers le burn out et le suicide.

Il y a également les médecins qui se déconventionneront à l'appel d'un syndicat ( appel que ne partage pas Médecins pour Demain ). Combien seront ils ? Les assises du déconventionnement qui se tiendront en mars affichent complet ! 2.000 ? 3.000 ? 10.000 ?

Enfin, il y a les jeunes, qui quittent le bateau dès leurs études ( 25% des étudiants en médecine, près de 50% des étudiants infirmiers ), et, pour ce qui concernent les médecins, ne s'installent pas ( 1/10 seulement dans l'année qui suit la fin de ses études ).

Alors, le bateau coule et il y a urgence, mais il semble que la Santé n'intéresse pas grand monde, au vu du nombre de députés présents hier soir, à peine plus de 70. Ceux qui, médecins comme infirmiers, ont tenu la barre en pleine tempête Covid, se voient remercier par une absence totale de valorisation, car l'on aurait pu s'intéresser à celles et ceux qui sont encore là et se sont investis au prix parfois de leur vie !

Triste époque qui verra nos anciens accéder plus tard à la retraite, et trouver les plus grande difficultés à trouver un médecin. Assurément, un grand progrès social.

P.S : je ne peux qu'inciter la relecture de Mme Bovary, de Stendhal, où Charles Bovary est... un officier de santé !"

(Avec AFP)

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