L’Assemblée examinera à partir de 16H00 les deux motions de censure déposées par le Nouveau Front populaire et l’alliance entre le RN et les ciottistes, pour faire chuter le Premier ministre, nommé le 5 septembre.
La motion du RN sera défendue par Marine Le Pen, selon une source au groupe RN, mais c’est celle de la gauche qui devrait être adoptée vers 20H00, le RN ayant l’intention de la voter. Ces deux motions ont été déposées lundi dans la foulée du déclenchement par le Premier ministre de l’article 49.3 de la Constitution, pour faire adopter sans vote le projet de loi de financement de la Sécurité sociale.
"Perte de repères"
Les responsables de l’exécutif et de la coalition gouvernementale ont voulu écarter l’inéluctabilité de ce scénario, en appelant à la "responsabilité" des députés.
Depuis Ryad, Emmanuel Macron a dit ne "pas croire au vote de la censure", pointant un "cynisme insoutenable" du RN s’il joignait ses voix à celles du NFP qui vilipende les lepénistes dans sa motion, et du côté du PS une "perte de repères complète". Michel Barnier a lui souligné sur TF1 et France 2, que chaque député avait "une part de responsabilité", espérant que prévale "l’intérêt supérieur du pays".
Si M. Macron a appelé à "ne pas faire peur aux gens" en évoquant un risque de crise financière, M. Barnier a lui dramatisé l’enjeu, répétant que la censure rendrait "tout plus difficile et plus grave", alors que les signaux sont déjà, selon lui, au rouge sur les plans budgétaire, financier, économique et social.
Attendu à 6,1% du PIB en 2024, bien plus que les 4,4% prévus à l’automne 2023, le déficit public raterait son objectif de 5% en l’absence de budget, et l’incertitude politique pèserait sur le coût de la dette et la croissance.
Après avoir cédé à Marine Le Pen sur le déremboursement des médicaments, M. Barnier s’est refusé à toute nouvelle concession, estimant que la cheffe de file du RN était entrée "dans une sorte de surenchère" en y ajoutant la réindexation des retraites.
"On va voir le RN voter une motion de censure des Insoumis qui les insultent", a déploré sur Europe 1 le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau (LR), évoquant "une mélenchonisation" du RN.
"Ce n’est pas une alliance avec la gauche", a répliqué sur France Inter le président du RN Jordan Bardella qui assume de s’opposer à "un budget dangereux pour la croissance et le pouvoir d’achat" et dénonce "une stratégie de la peur" de l’exécutif.
Lorsqu’un nouveau gouvernement reprendra la discussion budgétaire, il faudra que les lignes rouges du RN soient "entendues en intégralité", a-t-il déjà prévenu.
LR menace de reprendre sa liberté
Au sein du "socle commun" qui peinait déjà à soutenir de manière unie Michel Barnier (LR, Modem, Horizons et macronistes), les fissures pourraient s’élargir sur les stratégies d’après-censure.
LR menace déjà de reprendre sa liberté : son chef de file Laurent Wauquiez souligne que l’engagement de son parti avec la coalition gouvernementale en septembre "ne valait que pour Michel Barnier". De son côté, le chef de file des députés macronistes Gabriel Attal propose de nouer un accord de "non censure" avec le PS pour échapper à la tutelle du RN.
Pour Matignon, le vice-président du Modem Marc Fesneau a plaidé sur Sud Radio pour son... président François Bayrou, une "hypothèse sérieuse" car il "a le profil le plus pertinent". Les noms du ministre des Armées Sébastien Lecornu ou du LR Xavier Bertrand sont à nouveau évoqués comme cet été.
Beaucoup, à l’instar de la présidente de l’Assemblée Yaël Braun-Pivet, plaident en tout cas pour une solution rapide, qui permette de mener à bien au moins en partie les textes budgétaires avant la date butoir du 31 décembre.
A défaut, les députés devront voter une "loi spéciale" qui permette d’assurer la continuité du fonctionnement de l’Etat.
La gauche désunie sur l’après
La gauche reste de son côté désunie sur l’après-Barnier. Le PS voudrait "un gouvernement de gauche ouvert au compromis", que le socle commun s’engagerait à ne pas censurer en échange d’un renoncement au 49.3.
Mais Olivier Faure reste opposé à soutenir Bernard Cazeneuve à Matignon qui "n’a soutenu ni Raphaël Glucksmann aux élections européennes ni le NFP aux législatives".
Le sénateur écologiste Yannick Jadot souhaite même que ce gouvernement de gauche inclut "des ministres issus du bloc central" à l’opposé de la position de son parti.
De son côté, LFI continue de réclamer, de manière isolée, la démission d’Emmanuel Macron.
(Source AFP)