La gauche du "non" au Traité constitutionnel européen en 2005 s'est retrouvée vendredi 24 juin 2016 pour critiquer le déficit démocratique de l'Union européenne, le candidat à la présidentielle Jean-Luc Mélenchon se montrant le plus tranchant: "l'UE, on la change ou on la quitte". Quelques heures après le choix des Britanniques de quitter l'Union européenne, des représentants de la gauche de la gauche mais aussi du Parti socialiste ont fait entendre leur voix pour souligner que les Français avaient les premiers, il y a onze ans, rejeté le projet européen sur lequel on leur demandait de s'exprimer.
La France aussi avait dit non
En 2005, "le peuple français, par référendum, s'était nettement prononcé pour une refondation critique de l'Union européenne, plongée dans une dérive protectrice des rentes", a ainsi estimé dans un communiqué le président de l'Assemblée nationale Claude Bartolone (PS), à l'époque partisan du "non". Il a regretté que les responsables européens aient alors "répondu à ce cri d'alarme par une radicalisation de ce qui est devenu le consensus de Bruxelles, machine à détruire des services publics et à séparer les élites des peuples".
Évoquant un "déni répété" depuis 2005 de l'"exigence" démocratique, le secrétaire national du Parti communiste, Pierre Laurent a vu dans le Brexit "un nouveau choc révélateur de l'ampleur du désaveu populaire vis-à-vis de l'UE néolibérale". "Le temps est venu de refonder l'UE, de construire une Union de peuples et de nations libres, souverains et associés, tournée vers le progrès humain et la justice sociale", a insisté celui qui préside également le parti des gauches européennes. "Le vote des électeurs britanniques fait écho à ceux qui, en France comme en Espagne, en Grèce ou récemment en Italie, s'estiment dépossédés du projet européen car ils en subissent les effets sans être associés aux décisions prises", a analysé de son côté Benoît Hamon, député PS frondeur, dénonçant "la
cécité de la classe politique aux ravages démocratiques et sociaux provoqués par l'obsession libérale de l'Europe actuelle".
Le cri du petit peuple
Candidat à la présidentielle pour le Mouvement républicain et citoyen (MRC), ancien parti de Jean-Pierre Chevènement, le belfortain Bastien Faudot s'est réjoui que "l'Union européenne, telle que nous la connaissons, cette union irréversible, nouvel horizon historique indépassable, est morte cette nuit". Il a défendu "un nouveau départ comme une coopérative de nations", comprenant la "nationalisation de l'euro" et "la suppression de la Commission européenne".
Quant à M. Mélenchon, partisan d'une sortie des traités européens si ceux-ci ne peuvent pas être renégociés, il a estimé que le Brexit représentait "le cri du petit peuple du Royaume-Uni contre tout ce qui est la réalité quotidienne de l'Europe des traités", citant la "pauvreté", les "privilèges pour les riches" ou encore "l'arrogance des donneurs de leçon de flexibilité" et la "tyrannie sans visage des comptables de la Commission européenne". "Depuis 2005, la France puis les Pays-Bas, la Grèce: chaque fois que l'on pose la question au peuple de savoir s'il accepte ce qui est proposé par l'Europe, la réponse est non", a-t-il constaté lors d'un point-presse. Invitant les uns et les autres à "réfléchir avec soin" à l'événement, il a expliqué que "le refus des peuples n'est pas le refus de la paix, pas le refus de l'union et de la bonne entente". "Au fond, c'est le refus du fait qu'il n'y ait pas d'harmonisation fiscale, pas d'harmonisation sociale", a-t-il poursuivi.
Quelques instants plus tard, François Hollande, évoquant "la perte de confiance des peuples sur le projet" européen, a lui-même appelé à la mise en route réelle de cette harmonisation, sans cesse convoquée et jamais réalisée.
(AFP)