Cette enquête est "illustratrice d’un certain affairisme qui gagne le Haut-Doubs lié à cette fièvre immobilière, lié au fait que les transfrontaliers ont un pouvoir d’achat nettement supérieur au français moyen, le salaire moyen d’un transfrontalier étant 2,5 à 3 fois supérieur au salaire moyen en France, cela donne un pouvoir d’achat à certaines personnes qui génèrent une forte attractivité de l’immobilier à la frontière suisse", explique le procureur.
C’est dans ce contexte, suite à un signalement, que les gendarmes ont constaté qu’une personne s’était lancée dans des affaires de promotion immobilière et qui manifestement était "en dessous des radars". Cet homme, âgé de 32 ans, avait créé deux sociétés : l’une, en promotion immobilière, qui n’a aucune activité, l’autre, en conseil immobilier. Les gendarmes ont découvert qu’entre 2020 et 2022, cet homme avait procédé à de nombreuses acquisitions et reventes après avoir effectué des plus-values conséquentes, ce qui n’est pas illégal.
En revanche, ce qui est illégal, c’est qu’aucune traduction de ces transactions, soit dans le bilan des sociétés, soit dans ses déclarations fiscales personnelles, n’a été réalisée.
Les enquêteurs ont interpellé le mis en cause lundi 16 mai pour deux infractions principales : travail dissimulé et blanchiment de travail dissimulé.
Lamborgini, Mercedes, objets de luxe… en touchant le RSA
Cette interpellation a mené les gendarmes à des saisies particulières, dont deux voitures de prestige : une Lamborgini Huracán EVO Spyder de couleur orange d’une valeur de 265.000 euros, une Mercedes-Benz CL 65 AMG d’une valeur d’au moins 50.000 euros, toutes deux immatriculées à Monaco. Ces deux véhicules ont été retrouvés dans des box loués au nom du père du suspect, "qui n’a d’ailleurs jamais entendu parler de ces voitures", précise le procureur. Ce sont des saisies "qui objectivent le fait qu’il y a manifestement une dissimulation extrêmement importante", ajoute-t-il.
Les enquêteurs ont également retrouvé environ 50.000 euros d’objets, bijoux, vêtements et autres produits de luxe, mais ce n’est pas un bilan définitif, l’enquête n’est pas terminée.
Jusqu’il y a peu, cet individu qui a mené une vie de fortuné, percevait le RSA. Ce qui ne l’empêchait pas se montrer sur les réseaux sociaux avec ses produits de luxe.
Pour Etienne Manteaux, "c’est une affaire caricaturale, à la fois avec une utilisation de toutes les aides que l’État français peut apporter et avec aucune volonté de participer, de quelque façon que ce soit, à la solidarité nationale en déclarant ses produits".
Déjà condamné 7 fois pour des délits
Le trentenaire est défavorablement connu de la justice puisqu’il a déjà été condamné à 7 reprises pour des délits, dont des trafics de stupéfiants, conduite sous stupéfiant, trafics de produits anabolisants. Il avait une peine de 3 mois d’emprisonnement à exécuter. À l’issue de sa garde à vue mardi soir, il a été incarcéré en exécution de peine "puisque l’enquête démontre qu’il a commis une nouvelle infraction alors qu’il avait cette peine de trois mois d’emprisonnement à exécuter, même si, compte tenu de son quantum, il pouvait espérer un aménagement de peine", explique le procureur.
L’enquête se poursuit pour démontrer le nombre exact de ventes qui ont été réalisées, étudier les conditions dans lesquelles les travaux ont été faits avant les reventes des biens, les conditions dans lesquelles les appartements et les maisons ont été réaménagés, les conditions de transaction avec les notaires, etc. "Il y a fort à craindre que nous trouvions tout un gisement d’infractions pénales", selon Etienne Manteaux.