Génocide : la justice suspend l’expulsion d’un Rwandais vivant à Dijon

Le tribunal administratif de Dijon a suspendu l'arrêté d'expulsion d'Innocent Musabyimana, un Rwandais poursuivi pour sa possible participation au génocide au Rwanda en 1994, a-t-on appris lundi 15 juillet 2024 de source judiciaire.

Tribunal administratif de Dijon © www.google.com

Innocent Musabyimana, 52 ans, entré en France en 2007, avait dans un premier temps fait l'objet de poursuites au Rwanda, en 2012, accusé d’avoir participé au génocide qui a fait au moins 800.000 morts, selon l’ONU. Kigali avait alors réclamé son extradition, une demande rejetée en 2014 par la Cour de cassation française. Mais en 2019, les investigations sont relancées, cette fois en France, et le Rwandais est mis en examen en 2022 à Paris et placé sous contrôle judiciaire.

En raison de cette mise en examen, il perd en janvier 2024 son statut de réfugié. Le Rwandais a fait appel de cette mesure, ce qui est suspensif : il peut donc pour l'instant conserver son titre de résident. Cela n'empêche pas un arrêté préfectoral d'être pris à Dijon en juin dernier, ordonnant son expulsion et, le temps qu'elle soit mise en oeuvre, son assignation à résidence.

"Aucun pays de renvoi n'est fixé"

Le tribunal administratif de Dijon, statuant en référé, a cependant estimé qu'un "doute sérieux" était posé "quant à la légalité" de l'arrêté d’expulsion car le requérant ne représente pas une "menace grave à l'ordre public". M. Musabyimana, qui travaille et vit à Dijon, est en concubinage depuis 2015 avec une Française, et a des enfants mineurs.

De plus, souligne le tribunal dans sa décision dont l'AFP a obtenu copie, "aucun pays de renvoi n'est fixé". Le tribunal a également suspendu un arrêté assignant à résidence M. Musabyimana jusqu'à la mise en oeuvre de son expulsion et qui l’aurait contraint à pointer trois fois par jour au commissariat.

Cette mesure l'exposerait à "perdre son emploi", qui l'amène à voyager dans la région de Dijon, a souligné le tribunal, ajoutant que le contrôle judiciaire ordonné à la suite de sa mise en examen en 2022 l'oblige déjà à pointer deux fois par mois. "C'est un soulagement", a réagi auprès de l'AFP l'avocat du Rwandais, Philippe Meilhac, qui avait souligné "ne pas comprendre la logique" d’expulser quelqu'un qui pourrait être appelé à être jugé en France. Sa mise en examen peut de plus mener à un non-lieu, avait-il rappelé lors de l'audience, le 9 juillet.

Interrogé par l'AFP sur son éventuelle intention de faire appel, l’avocat. de la préfecture, Romain Dussault, n'avait pas répondu dans l’immédiat. La légalité des arrêtés doit encore faire l'objet d'une décision sur le fond dont la date n'est pas encore fixée.

(Source AFP)

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