Expositions “Corps sans graphie” à ne pas manquer au Frac Franche-Comté à Besançon
PUBLI-INFO • Le Frac présente ses nouvelles expositions du 18 avril au 31 août. Corps sans graphie rassemble trois expositions qui interrogent le corps dans sa représentation et dans son rapport à l’espace.
Un homme qui dort de Laurent Goldring donne à voir des corps refoulés, des corps tels que nous n’en voyons jamais sinon dans les peintures d’un Bacon ou d’un Picasso, pour dénoncer les représentations normées et leur pouvoir de prescription sur nos corps. Des corps étranges encore, mais néanmoins poétiques et politiques, comme manifestation de l’hybridité, de la désorientation, de l’oppression voire de la folie dans l’exposition d’œuvres de la collection, Corps insensés. Le corps des visiteurs enfin, conviés par Alex Cecchetti à générer de la musique en pénétrant dans l'installation, MUSIC-HALL, inspirée d’un poème et s’apparentant à un gigantesque Thérémine. Commissariat : Sylvie Zavatta, directrice du Frac.
Laurent Goldring, Un homme qui dort
Depuis les années 1990, Laurent Goldring interroge la représentation à partir de celle du corps. Il s’emploie à révéler la façon dont l’image (photographie, film ou vidéo) détermine la perception que nous en avons. Dans ses boucles vidéo et dans ses photographies, il donne à voir des corps méconnus ou refoulés, des corps tels que nous ne les voyons jamais, sinon dans les peintures d’un Bacon ou d’un Picasso. Mais des corps sans doute plus « vrais », plus « ressemblants » que bien des représentations codées du monde de l’art. Ainsi « la question posée par Goldring est double : elle s’adresse à la fois au corps, comme construction anatomique et culturelle illusoire, et également à l’image » (Laurence Louppe, « Danse-photographie : pour une théorie des usages », Art Press n° 281, juillet-août 2002.) et à son pouvoir de prescription sur les corps.
L’exposition de Laurent Goldring présentée par le Frac Franche-Comté rassemble, aux côtés de vidéos et d’œuvres inédites, deux installations majeures : Cesser d’être un (2020) a été acquise par le Frac en 2021 et montrée une première fois au sein de l’exposition Dancing Machines (Besançon, 2020) et Le Terrier. Deux impressionnantes sculptures où le corps génère son espace particulier, un espace humanisé et qui se révèle le prolongement du corps lui-même.
Avec les œuvres de Mathieu Kleyebe Abonnenc, Manon de Boer & Latifa Laâbissi, Marina De Caro, Agnès Geoffray, David Mach, Émilie Pitoiset, Sylvie Selig et Laurent Goldring. En dialogue avec l’exposition de Laurent Goldring et autour de l’une de ses photographies, le Frac présente des œuvres de sa collection au sein d’une exposition intitulée Corps insensés.
Dans son installation intitulée There wasn’t much room in the pool for individual expression, David Mach esquisse des corps inertes et flottants dans un espace aquatique indéfinissable. Marina De Caro propose quant à elle des photographies et une œuvre textile évoquant des corps mêlés ou en voie de métamorphose, auxquels répondent ceux imaginés par Sylvie Selig, hybrides et chimériques, comme autant de protagonistes d’un conte cruel . Dans leur prolongement, Mathieu Kleyebe Abonnenc filme les contorsions d’une danseuse devenue femme-araignée pour évoquer celles des esclaves entravés au fonds des navires négriers, tandis qu’Émilie Pitoiset s’empare d’images réalisées lors de concours de danse aux États-Unis lors de la grande dépression des années 1930, lesquels ont inspiré le livre d’Horace McCoy et le film éponyme On achève bien les chevaux. Avec Manon de Boer et Latifa Laâbissi, le corps accède à la transe, celle de la sorcière. Persona est un film réalisé par Manon de Boer sur la performance Écran somnambule (2012) de Latifa Laâbissi basée sur un court enregistrement de Hexentanz (1926), un solo de danse créé par la danseuse et chorégraphe expressionniste allemande Mary Wigman (1886-1973). Les photographies d’Agnès Geoffray, issues d’autres archives, participent enfin d’un ensemble intitulé Les chutes autour de l’hydracropsychisme (un état morbide poussant de façon irrésistible un individu à se jeter dans les eaux) et de la notion de «?suspens catastrophique?».
Des corps insensés, mais néanmoins poétiques, comme manifestation de l’étrangeté, de l’hybridité, de la désorientation spatio-temporelle, voire de la folie. Mais aussi des corps politiques en prise aux problématiques d’oppression et de domination.
Les œuvres d’Alex Cecchetti s’inspirent souvent d’un poème. Il en est ainsi pour MUSIC-HALL, œuvre acquise par le Frac en 2021, puisque son point de départ est Kubla Khan écrit par Samuel Taylor Coleridge (1772-1834). Dans ce poème, le poète, fondateur du mouvement romantique anglais, imagine une musique capable de bâtir à elle seule un palais entier avec ses jardins, fontaines, grottes et rivières.
Avec MUSIC-HALL, Alex Cecchetti, qui intègre régulièrement la musique à ses œuvres, propose au public un environnement immersif où chacun, de son corps, pourra donner vie à un concert : « L’espace qui vous entoure est ici transformé en instrument de musique, et lorsque vous traverserez l’espace (…), votre mouvement produira des notes de la gamme pentatonique chinoise.
La musique de votre corps se joue à partir du cône de cuivre qui flotte sur votre tête : une sorte de thérémine gigantesque qui transforme l’espace en champ musical. Le long du mur, vous pouvez voir cinq aquarelles, ce sont des vues du palais de la musique, et leurs positions respectives marquent les cinq “notes” pures du pentatonique chinois. Il semble que ce soient les notes qui ont créé le monde. Utilisez votre corps pour faire votre propre musique.