Le chef de l'Etat, accueilli à chaque visite de terrain par un concert de casseroles et de sifflets depuis l'adoption de la réforme des retraites, a pu montrer cette fois qu'il pouvait aussi aller sans accroc au contact des Français, même si certains échanges ont été vifs et directs.
"Moi je vais au contact. Pourquoi ? Pour entendre les difficultés des Français. Avoir des idées nouvelles, ressentir ce qui est compris, ce qui n'est pas compris", a-t-il dit devant des passants.
"Et aussi pouvoir traiter des colères, mais de le faire de manière non-organisée artificiellement", s'est-il justifié, jugeant "inutiles" les déplacements "où tout est arrangé parce que ça se passe trop bien et ceux où tout est arrangé parce que ça se passe trop mal".
"Voiture de fonction, logement gratos, on n'a pas tous ça nous"
La hausse des prix, les fins de mois difficiles, les petites retraites ont dominé les échanges, avec parfois aussi des piques plus personnelles. "Tout est cher. Il y a des gens qui crèvent de faim", lui a lancé une passante, ajoutant : "voiture de fonction, logement gratos, on n'a pas tous ça nous hein".
Une commerçante s'est plainte d'être "en retraite et de travailler quand même". Une autre dame renchérit : "on ne vit pas avec 1.000 euros par mois".
"Pour 1.200 euros, je ne me lève pas à 4h du matin", s'agace un passant. Un autre s'énerve sur les patrons de la grande distribution : "Quand est-ce qu'on va arrêter de permettre à ces gens de s'en foutre plein les poches", dit-il. "Ça choque tout le monde. Moi aussi ça me choque", a admis en retour M. Macron, épinglant des "écarts" tels qu'on "ne peut plus les expliquer aux gens".
"Recréer une dynamique salariale"
Emmanuel Macron a rappelé les baisses d'impôts, la suppression de la taxe d'habitation, les chèques énergie ou la hausse des petites pensions avec sa réforme très contestée des retraites. Les charges, "on n'a pas arrêté de les alléger je me suis déjà fait engueuler là dessus", a-t-il fait valoir. "Maintenant il faut qu'on arrive à recréer une dynamique salariale... c'est pas le gouvernement qui peut le faire", a-t-il plaidé, renvoyant la balle dans le camp du dialogue social.
Un ancien représentant local des gilets jaunes, Fabrice Schlegel, l'a aussi vivement interpellé sur le "déficit colossal", la "dépense publique", lui reprochant d'avoir "tué la fonction hospitalière, la médecine de proximité" et de dire "beaucoup de bêtises". "Vous nous enfumez depuis cinq ans", a-t-il accusé.
"Vous êtes quand même un drôle (..) Vous me demandez plus de dépenses en fait", a répliqué le président en contestant les chiffres alignés par son interlocuteur.
200 et 300 manifestants retenus par un cordon de gendarmerie
Dans le même temps, entre 200 et 300 manifestants attendaient le président près de Pontarlier, retenus au prix de quelques bousculades par un cordon de gendarmerie à plus d'un kilomètre du lieu du discours, selon des journalistes de l'AFP.
"Ils bloquent les gens, ça décourage du monde de venir à pied, je pense que c'est le but recherché", témoigne Pascal Maillard, 62 ans, retraité d'Enedis. "On n'a jamais vu un président qui se protège de cette manière, et qui nous méprise autant", a-t-il grincé.
Une casserole à la main, Céline, 51 ans et enseignante en primaire, explique: "je suis venue parce que je suis contre la réforme des retraites, qui va pénaliser les femmes particulièrement. J'ai dû marcher 40 minutes pour arriver jusqu'ici. Ce dispositif (...) c'est démesuré : on n'est pas des terroristes, on veut juste se faire entendre", déplore-t-elle.
(AFP)