L’allocution présidentielle sera précédée mardi matin par un nouveau conseil de défense sanitaire pour trancher sur le sujet le plus urgent : comment pousser les Français actuellement éligibles à une troisième dose – plus de 65 ans, soignants, obèses, victimes de comorbidités – à franchir le pas ?
Le Premier ministre Jean Castex, qui a déjeuné avec le chef de l’État ce lundi et qui sera en déplacement à Colombey-les-Deux-Églises pour les cérémonies du 51e anniversaire de la mort du général de Gaulle, sera représenté par son directeur de cabinet Nicolas Revel.
Pass sanitaire et troisième dose
Alors que le nombre de cas quotidiens remonte, l’exécutif espère, via le rappel vaccinal, éviter une nouvelle vague, d’autant plus redoutée qu’un variant plus contagieux se répand au Royaume-Uni. Et seules 3,4 millions des 7,7 millions de personnes éligibles se sont fait revacciner.
La piste la plus évoquée, celle de conditionner la dose de rappel au maintien du pass sanitaire, "est sur la table", a indiqué vendredi le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal.
Plusieurs scénarios sont envisagés : parmi ceux-ci, l’exécutif pourrait annoncer cette conditionnalité pour les personnes à risques et attendre l’avis de la Haute Autorité de santé et du Conseil scientifique pour l’étendre éventuellement à d’autres populations. Mais lier le pass sanitaire à la troisième dose est loin de faire l’unanimité : l’Académie de médecine s’est prononcée contre, invoquant un problème possible d’acceptabilité face à un pass sanitaire controversé. Une option pourrait être de donner un délai d’un mois pour avoir un rappel avant que le pass ne soit désactivé, selon une source gouvernementale.
Autre obstacle, lier une 3e dose au maintien du pass sanitaire soulèverait un problème technique et éthique, car le pass sanitaire "reconnaît votre âge, mais pas votre diabète", relève la même source. Le chef de l’État pourrait aussi choisir de recommander le rappel pour tous, comme vient de l’annoncer l’Italie.
Lier le pass sanitaire à la troisième dose est loin de faire l'unanimité: l'Académie de médecine s'est prononcée contre, invoquant un possible problème d'acceptabilité.
Les parlementaires semblent partagés sur la situation sanitaire, des élus de la majorité appelant à la 3e dose du vaccin face à la "cinquième vague" de Covid, pendant que l'opposition, dubitative, critique les décisions "solitaires" du président.
L'opposition reste échaudée par l'adoption définitive vendredi du projet de loi de vigilance sanitaire qui rend possible le recours au pass sanitaire jusqu'à fin juillet. Saisi par la gauche et la droite, le Conseil constitutionnel doit rendre sa décision sur le texte en fin d'après-midi.
"Ce que j'attends sur le plan sanitaire, c'est une parole d'équilibre. Il faut être vigilant parce qu'il y a un redémarrage, mais on ne peut pas, au nom de cette vigilance, intégrer une troisième dose au pass sanitaire", "l'imposer" et la "généraliser", considère le chef de file des sénateurs LR Bruno Retailleau, sur France Inter.
Emmanuel Macron dispose d'un "chèque en blanc sur l'arsenal juridique qui lui permet de faire tout, tout seul", critique le député communiste Sébastien Jumel. "On parle beaucoup de troisième dose mais il faut faire en sorte de la rendre accessible à tous ceux qui la souhaitent. Ce qui veut dire réactiver les centres de vaccination et que l'Etat paye", prévient Valérie Rabault, cheffe de file du groupe socialiste à l'Assemblée.
Quid des réformes ?
Politiquement, cette allocution solennelle, sans questions, devrait permettre au chef de l’État de reprendre l’initiative à cinq mois du premier tour de la présidentielle.
Emmanuel Macron entend d’ailleurs parler de ses projets, comme lors de son adresse télévisée du 12 juillet, qui avait été consacrée à parts égales à la crise sanitaire et aux grands chantiers post-Covid. Il devrait évoquer les réformes, comme celle de l’assurance chômage, ou celle des retraites qui reste en suspens. Le 12 juillet, Emmanuel Macron avait lié cette réforme à une sortie de la crise sanitaire, que le rebond épidémique éloigne.
"Tout ça est organisé pour l’après-élection", a affirmé dimanche Arnaud Montebourg, candidat à la présidentielle, en prédisant qu’Emmanuel Macron allait "dissimuler" cette "réforme impossible", qu’il fera "sans vous le dire" s’il est réélu. Vantant son bilan, Emmanuel Macron pourrait enfin évoquer ses initiatives à l’international, comme ce "Forum de Paris pour la paix" qu’il réunit en fin de semaine en présence de la secrétaire d’État Kamala Harris, ainsi que ses projets pour la présidence française de l’Union européenne, sans oublier l’environnement, en pleine COP26.
(AFP)