"Rien n'est acquis", a souligné le président, qui a commencé son allocution juste après les applaudissements de 20h. A la fin du confinement, "à partir du 11 mai, nous rouvrirons progressivement les crèches, les écoles, les collèges et les lycées", a-t-il ajouté, mais les universités ne rouvriront pas "avant l'été".
"Le 11 mai, nous serons capables de tester toutes les personnes ayant un symtôme", a-t-il affirmé, tout en demandant aux personnes âgées et fragiles de rester confinées.
Selon un dernier bilan lundi soir, l'épidémie de coronavirus a fait 14.967 morts en France, 574 de plus depuis dimanche. 9.588 personnes sont mortes dans les hôpitaux (335 de plus en 24 heures) et 5.379 dans les maisons de retraite et autres établissements médico-sociaux. Pour le cinquième jour consécutif, le nombre de patients en réanimation a également baissé: 24 patients en moins depuis dimanche.
Réouverture progressive des crèches écoles, collèges et lycées
Créant la surprise, Emmanuel Macron a annoncé qu'à partir du 11 mai, seraient rouvertes "progressivement les crèches, les écoles, les collèges et les lycées". En revanche, dans l'enseignement supérieur, "les cours ne reprendront pas physiquement avant l'été". La France pourra "tester toute personne présentant des symptômes" et chaque Français devra pouvoir se procurer "un masque grand public", a assuré le chef de l'Etat.
En revanche, bars et restaurants resteront fermés, et les grands festivals et rassemblements restent bannis au moins jusqu'à mi-juillet, une lourde menace notamment pour Cannes et le Tour de France, qui ne pourront de toute façon plus se dérouler à leurs dates prévues. Peu après le discours présidentiel, les organisateurs du Festival d'Avignon (le "in") ont jeté l'éponge et annoncé son annulation. Les Eurockéennes de Belfort sont également annulées.
Répondant aux inquiétudes -notamment soulignées par le Secours Catholique- d'un basculement dans "la grande précarité" de nombreux Français, notamment les étudiants et les intérimaires, Emmanuel Macron a annoncé une aide sans délai aux familles les plus modestes et pour "les étudiants les plus précaires".
Les frontières de la France avec les pays non-européens "resteront fermées jusqu'à nouvel ordre", a-t-il affirmé. En attendant, il a estimé que la crise sanitaire devait être "un moment de vérité", "de refondation" pour l'Europe, avec plus "d'unité et de solidarité". De même, Il a estimé que la France et l'Europe allaient devoir aider l'Afrique à lutter contre le coronavirus en "annulant massivement sa dette".
"Contradiction"
Gilles Le Gendre, patron des députés de la majorité LREM, a salué sur Twitter des "jalons du déconfinement" à venir qui "concilient sécurité sanitaire, redémarrage économique et justice sociale". Le Medef s'est dit "satisfait que le président ait fixé un cap pour remettre le pays en marche".
Mais la réouverture progressive des écoles a immédiatement suscité inquiétudes et critiques chez les enseignants. Selon l'entourage d'Emmanuel Macron, il s'agit d'un "vrai choix du président", qui espère ainsi "lutter contre les inégalités sociales et aider à la reprise du travail."
Après quatre semaines de confinement, le bien-être des enfants préoccupe également de plus en plus. "Le temps passe, le stress monte", a expliqué le psychiatre Richard Delorme sur France Inter. "On ne les voit pas tellement dans la rue. On les met devant la télévision, devant les écrans et ils sont très tendus", souligne ce chef du service de psychiatrie de l'enfant à l'hôpital parisien Robert-Debré.
"C'est tout sauf sérieux de rouvrir les écoles le 11 mai car on nous dit que tous les lieux publics sont fermés, les cinémas, les salles de spectacle, mais pas les écoles alors que l'on sait que c'est un lieu de haute transmission, de haute contamination, il y a un manque de précaution, ça parait être en contradiction totale avec le reste", a réagi Francette Popineau, secrétaire générale du Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, interrogée par l'AFP. "Il va y avoir une forte incompréhension de la part des enseignants, on a l'impression d'être sacrifiés sur l'autel de l'économie", a-t-elle dit.
Le déconfinement, déjà amorcé dans quelques pays européens, s'annonce comme une entreprise infiniment délicate.
L'opération pourrait s'avérer catastrophique si n'était pas mis en place un système de tests massifs et d'isolement des personnes infectées, selon une étude réalisée notamment par l'Inserm qui laisse entendre qu'il ne pourrait pas intervenir avant fin mai-juin. "La levée du confinement sans stratégie de sortie entraînerait une deuxième vague écrasant largement le système de santé", selon le résumé de l'étude, mise en ligne dimanche et révélée lundi par Le Monde.
"Le confinement est la seule bonne mesure. on est au milieu du guet. Déconfiner trop tôt c'est s'exposer au rebond", a souligné Christophe Rapp, infectiologue à l'hôpital américain de Neuilly-sur-Seine, sans se prononcer sur la date du 11 mai.
"La grande nouvelle c'est que le virus circule, l'immunité collective tant espérée n'arrive pas. au mieux, 10% des Français ont contracté la maladie. On va rejouer l'isolement et le dépistage des cas contacts. C'est une nouvelle maladie qui devient pérenne", a-t-il mis en garde.
Réactions
Dans l'opposition, le chef des Insoumis Jean-Luc Mélenchon a critiqué un "déconfinement sans planifier les conditions du déconfinement, c'est extrêmement dangereux!". "Caler les consignes sanitaires sur les capacités de tests est une folie", a jugé Julien Bayou, secrétaire national des écologistes d'EELV.Le patron des Républicains, Christian Jacob, a lui estimé que "les mots ne suffiront plus" et que face au retard, "il faut maintenant anticiper le redémarrage de l'économie secteur d'activité par secteur d'activité".
Le chef de l'Etat, qui subit la défiance de l'opinion envers sa gestion de la crise, a conclu en se disant persuadé qu'il y aura des "jours meilleurs". Il faut "nous réinventer, moi le premier", a-t-il dit, notamment en sortant "des sentiers battus" et des "idéologies".
Il y a une "nette évolution de ton, et pour la première fois, une forme d'humilité" relève Jean-Daniel Levy, directeur du département politique d'Harris Interactive. Selon lui, Emmanuel Macron a "de manière nette, admis des erreurs de sa part et de son gouvernement, notamment sur les masques".
(AFP)
Article du 13 avril à 9h30
Les Français attendent ce lundi 13 avril 2020 à partir de 20h02 - pour laisser le temps d'applaudir les soignants - les annonces d'Emmanuel Macron, qui devrait prolonger le confinement de plusieurs semaines et signifier que la lutte contre le Covid-19 est loin d'être maîtrisée, en dépit des chiffres plutôt encourageants de ce long week-end de Pâques.
Le chef de l'Etat, qui doit s'exprimer peu après 20h, envisage, selon son entourage, de prolonger au-delà du 10 mai le confinement auquel est astreint le pays depuis le 16 mars.
Pour sa quatrième prise de parole solennelle très attendue depuis le début de la crise sanitaire, Emmanuel Macron "devrait évoquer une date de fin de confinement courant mai, au moins après le pont du 8-10 mai", selon plusieurs de ses proches.
"Une date suffisamment lointaine pour qu'on comprenne qu'on pourra alors commencer un début de déconfinement partiel, mais extrêmement progressif", mais également "suffisamment proche pour esquisser la France d'après", fait-on valoir dans l'entourage du chef de l'Etat.
"L'heure du confinement va durer", avait pour sa part averti dès mardi le Premier ministre Edouard Philippe, préparant l'opinion à sa prolongation.
Emmanuel Macron est aussi attendu sur la méthode qu'il entend mettre en oeuvre pour faire redémarrer le pays après le confinement, alors qu'il est acquis que le retour à la normale ne sera pas immédiat. Pas question, par exemple, de rouvrir aussitôt commerces et écoles. "On commence à comprendre aujourd'hui que la sortie du confinement ne sera pas un retour à la normale", expliquait dimanche sur France Inter Stanislas Guerini, le délégué général de La République en marche, comme pour préparer les esprits: "Il ne faut trop rapidement se projeter dans le jour d'après. Nous entrons pour de nombreux mois" dans une crise "qui sera extrêmement profonde".
Le chef de l'Etat sait aussi qu'il doit désamorcer une défiance grandissante envers sa gestion de la crise. Une défiance attisée, selon les instituts de sondage, par le flottement autour de la gestion des masques de protection. L'opinion critique notamment la position de l'exécutif contre leur généralisation et sa capacité à importer les masques promis.
"Volonté de rassemblement"
Comme pour chacune de ses précédentes allocutions depuis le 12 mars, Emmanuel Macron pourrait aussi en conclusion dessiner plus précisément ses projets pour "le jour d'après", notamment les nouvelles priorités qui dessineront les deux dernières années de son quinquennat.
Le chef de l'Etat a décalé sa prise de parole à lundi pour prendre le temps de consulter, des médecins -dont le professeur Didier Raoult, héraut du traitement à l'hydroxychloroquine contre le Covid-19, avec qui il s'est entretenu presque chaque jour, selon un proche-, mais aussi des élus, associations et homologues européens.
"Sur ces décisions lourdes, il a une vraie volonté d'union et de rassemblement, en prenant des avis directement sur le terrain", souligne un membre de son entourage. Il devait encore s'entretenir dimanche et lundi avec les présidents des deux assemblées, Gérard Larcher et Richard Ferrand, ainsi que plusieurs maires de régions différentes, ou encore la chancelière allemande, Angela Merkel.
Emmanel Macron ne devrait pas s'avancer en revanche sur des décisions très concrètes, comme le port généralisé du masque, la méthode de tests ou le traçage des malades, sur lesquelles il laisse généralement s'exprimer le Premier ministre ou le ministre de la Santé Olivier Véran.
- Autre sujet sur lequel il est attendu: la question de la fermeture des frontières nationales ou de l'UE, même s'il sera au menu d'un sommet européen virtuel fin avril.
L'opposition a multiplié de son côté ses critiques de la gestion de la crise. Le député LR Eric Ciotti s'est dit "en colère" qu'on ait "laissé mourir nos vieux" du Covid-19 dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Et Marine Le Pen (RN) a dénoncé "l'inertie d'une véritable bureaucratie qui fait que l'on a le sentiment que rien n'avance". Les chiffres annoncés dimanche soir traduisent, selon la Direction générale de la Santé, "l'amorce d'un très haut plateau".
"L'épidémie se poursuit dans notre pays de façon dynamique et continue à frapper durement", "nous devons rester vigilants car les services hospitaliers et de réanimation prennent en charge de très nombreux patients", insiste-t-elle, alors que la France compte encore 6.845 cas graves.
(AFP)