maCommune. info : avec de nombreuses voies en bleu, on a l'impression qu'une grande partie des voies de la ville sont cyclables... Est-ce vraiment le cas ?
Damien Bonnet : Le plan n'est pas mensonger, mais certains aménagements sont mal assimilés par le grand public. C'est le cas de la zone de rencontre (Boucle plus Battant en rose). C'est une zone à 20 km/h qui donne la priorité aux piétons et aux cyclistes... avec double sens cyclable dans les rues à sens unique pour les véhicules à moteur. La zone est donc en bleu, car même si les aménagements ne sont pas visuels, la réglementation de la zone prime. Mais peu de gens le savent et surtout le respectent !
C'est le cas de toutes les zones 30 aussi coloriées en sable/saumon. Les équipements ne sont pas forcément là, mais la réglementation prime ! Après on voit déjà beaucoup moins de bleu plein...
Adrien Caillot : Damien a raison. Mais il faut dire aussi que ce plan prête à confusion. L'utilisation d'une même couleur pour les axes structurants équipés et toutes les rues des zones apaisées est une idée discutable. D'une part, cela noie dans la masse les itinéraires cyclables structurants (alors que le plan devrait les faire ressortir), et d'autre part, les usagers ont l'impression qu'on se moque d'eux, qu'on a peint toutes les rues en bleu pour faire apparaître une ville totalement cyclable sur le papier alors qu'elle ne l'est pas en vrai.
Exemple : la rue des Jardins est en bleu foncé (parce qu'elle est classée en zone 30), alors que dans les faits peu de cyclistes oseront s'aventurer, en montée, dans le dangereux passage sous la voie ferrée !
DB: Sur le plan sont aussi indiqués des "itinéraires cyclables conseillés" qui permettent à un cycliste de visualiser son trajet hors axes à fort trafic, même si ce dernier n'est pas totalement aménagé.
AC: Oui, et sur le principe, c'est plutôt bien. L'ancien plan n'indiquait que les tronçons aménagés, et le cycliste devait se débrouiller de l'un à l'autre. Là, l'idée est de relier ces tronçons par des itinéraires conseillés. L'usager a surtout besoin de ça : un plan qui lui dise par où passer.
Malheureusement, ces itinéraires conseillés ne nous satisfont pas tous. Par exemple l'un d'entre eux passe par l'avenue du Commandant Marceau pour éviter la rue de Vesoul. En réalité, il est moins dangereux de monter cette dernière (dont la largeur permettrait de réaliser un aménagement cyclable, que nous demandons toujours...) que d'effectuer une difficile manœuvre de tourne-à-gauche pour rejoindre l'avenue Marceau (dont la largeur ne permet, en plus, pas une bonne cohabitation avec les voitures !)
Nous avons vu ce plan peu avant sa sortie, et disposé d'un laps de temps très court pour formuler des remarques. Dans ces conditions, notre influence a été quasi nulle. Ce genre de document devrait se travailler en concertation avec les associations d'usagers tout au long de son élaboration. Pas une fois que tout est bouclé.
Maintenant qu'il est sorti, je lis les différents commentaires sur les réseaux sociaux. La réaction des usagers est celle que j'attendais, mais en pire ! Les points critiqués sont ceux que j'avais soulevés, mais exprimés de façon bien plus virulente ! Autrement dit : ça ne passe pas. Si nous avions été associés à ce travail tout au long de sa réalisation, nous n'en serions pas là...
mC : Quelles améliorations ont été apportées et que reste-t-il à faire ?
AC: Depuis 1990, notre association a obtenu beaucoup de choses. Il faut se souvenir qu'avant, les zones piétonnes du centre étaient interdites aux vélos ! Et il y avait des sens uniques partout, sans alternatives pour les vélos. On a forcé les cyclistes, pendant des dizaines d'années à prendre les trottoirs malgré l'illégalité et le danger que cela représentait ! Aujourd'hui, on crée des zones apaisées comme au centre-ville. Beaucoup de sens uniques sont à double sens pour les vélos. Des grands axes tels que le boulevard Diderot, encore récemment hostile aux cyclistes, sont réaménagés intelligemment... Ça progresse.
DB: Par contre la ville a encore beaucoup de retard au niveau des aménagements surtout sur certains grands axes (rue de Vesoul, rue de Belfort...).
AC: Absolument. On va dans le bon sens, mais pas assez vite. On le voit bien en comparant à d'autres villes qui avancent beaucoup plus vite.
mC : Avec le chantier du tram, de nombreux Bisontins optent pour le vélo. Mais peut-on vraiment rouler en sécurité ?
AC: Sans hésitation, oui ! Mais il faut prendre le temps de choisir son itinéraire en fonction de ses capacités, et de sa connaissance du terrain et des automobilistes. Les itinéraires ne sont pas tous cyclables, loin de là.
DB: Opter pour le vélo est une bonne chose. Ça réduit les bouchons, on va plus vite et on garde la santé !
Mais il faut raisonner en itinéraires vélo et non plus auto ! Les nouveaux cyclistes prennent souvent le même trajet qu'en voiture et rencontrent alors des situations stressantes. Prendre son vélo, c'est aussi revoir son trajet pour aller d'un point A à B. Ne plus chercher forcément le plus court, mais le plus plat et sans grands flux de circulation. Là, le plan vélo peut aider les cyclistes, mais l'AVB peut aussi aider à trouver des cheminements.
Par ailleurs, en pensant bien faire, ces jeunes cyclistes peuvent se mettre eux-mêmes en danger : trop se serrer pour laisser passer une auto, griller un feu, rouler sur le trottoir, serrer les voitures en stationnement sans prendre garde à une ouverture de portière, etc. Autant de dangers masqués pour un débutant, mais qui sont facilement évitables. Là aussi, l'AVB peut aider tous ces gens à reprendre le vélo de façon plus rassurante.
On ne peut pas dire qu'il n'y aura pas d'accident, mais on peut les réduire de façon conséquente... Personnellement, depuis plus de 25 ans de vélo, je n'ai eu que 3 ou 4 accrochages mineurs.
mC : Quel(s) conseil(s) donneriez-vous à ceux qui souhaitent se mettre au vélo aujourd'hui à Besançon ?
DB: Déjà de se sentir à l'aise avec son vélo avant d'aller sur la chaussée. Vérifier l'état de son vélo et surtout les freins. Être visible ! Surtout lors de cette période de l'année où la nuit est assez présente. Bien penser à avoir de l'éclairage fixe sur son vélo (obligatoire), voire un gilet jaune. Être visible limite énormément les risques d'accident !
AC: J'ajouterai aussi de tenir compte de l'autre ! C'est essentiel. C'est valable pour les piétons : on ne les frôle pas, on ne prend pas les trottoirs. Et pour les automobilistes : on anticipe leurs manœuvres et leurs fautes d'inattention (qui sont très facile à déceler !). On vérifie qu'ils nous ont vus (en croisant leur regard). On les remercie quand ils sont courtois, pour les inciter à persévérer... Quand ils ne le sont pas, à vous de voir !