Pour rappel, en octobre 2022, des troupeaux de bovins avaient été victimes d’attaques, dont l’auteur aurait été le loup, sur le territoire des communes de Chaux-Neuve et de Chapelle d’Huin. Les éleveurs concernés avaient alors présenté au préfet des demandes d’autorisations pour pouvoir effectuer des tirs de défense simple en cas de nouvelle attaque. Le préfet du Doubs avait pris deux arrêtés autorisant ces tirs de défense.
Estimant que la législation applicable n’était pas respectée, trois associations ayant pour objet la défense des animaux, et notamment des prédateurs, ont demandé au tribunal l’annulation de ces arrêtés préfectoraux.
Ce que dit la loi
Dans sa décision, le TA rappelle que le loup est une espèce protégée en vertu du droit européen. Sa destruction est donc en principe interdite. Toutefois, la loi a prévu sous certaines conditions des dérogations à ce principe par exemple pour prévenir des ”dommages importants à l’élevage”.
Concernant le loup, c’est un arrêté ministériel du 23 octobre 2020 qui fixe les conditions et limites dans lesquelles ces dérogations peuvent être accordées, explique le tribunal. Cet arrêté prévoit notamment que ”Les tirs de défense simple peuvent intervenir dès lors que des mesures de protection sont mises en œuvre ou que le troupeau est reconnu comme ne pouvant être protégé (...) .”
Les modalités de protection d’un troupeau contre le loup sont prévues par l’arrêté du 28 novembre 2019 relatif à l'opération de protection de l'environnement dans les espaces ruraux portant sur la protection des troupeaux contre la prédation. Elles sont pour l’essentiel au nombre de trois : le gardiennage renforcé ou la surveillance renforcée ; l’utilisation de chiens de protection ; des investissements matériels (parcs électrifiés).
Par ailleurs, pour qu’un troupeau puisse être reconnu comme ne pouvant pas être protégé, le préfet de département doit soumettre pour avis au préfet coordonnateur du plan national d'actions sur le loup une analyse technico-économique réalisée au cas par cas.
Manque de preuves et absence de formalité
Les deux arrêtés préfectoraux attaqués ont été annulés par le tribunal sur des fondements différents dès lors que les deux troupeaux concernés ne se trouvaient pas dans la même situation.
Le premier arrêté préfectoral contesté a été pris pour un troupeau reconnu par le préfet du Doubs comme ”non-protégeable”. Le préfet n’a toutefois pas fait réaliser d’analyse technico-économique pour aboutir à cette conclusion et ne l’a pas soumise pour avis au préfet coordonnateur du plan national d'actions sur le loup. Ces formalités étant substantielles, leur absence a conduit le tribunal à annuler ce premier arrêté.
Le second arrêté préfectoral contesté concernait, quant à lui, un troupeau ovin, dont il était allégué qu’il bénéficiait effectivement de mesures de protection. Pour juger que cet arrêté était illégal, le tribunal a considéré que le critère relatif au risque de dommages importants n’était pas rempli, dès lors notamment que le troupeau n’avait pas subi d’attaque depuis plus de 13 ans, l’attaque d’octobre 2022 n’ayant visé que le troupeau bovin du même GAEC. En outre, le tribunal a estimé que le préfet n’avait pas apporté la preuve de la réalité des mesures de protection du troupeau concerné.
(Communiqué)