Rencontre avec Yves Ravey aux Sandales d’Empédocle

rencontre avec l’auteur bisontin Yves Ravey autour de son nouveau roman: Que du vent, toujours paru chez Minuit.
Une fois encore, Yves Ravey nous ravit avec ce polar décalé, qui met en scène un casse entre voisins, prétexte à nous faire plonger dans la noirceur humaine.

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Barnett Trapp, le narrateur, ancien militaire passé par la guerre en Irak, fait commerce de produits d'entretien discount qu'il stocke dans l'entrepôt jouxtant sa maison. Une affaire qu'il vient de lancer après avoir fait faillite dans les ambulances. Il vient aussi d'être quitté par sa femme, Josefa, en instance de remariage avec un professeur d'histoire, et il ne voit plus son fils David. Il observe aux jumelles sa voisine Sally, une belle femme rousse mariée à un certain Miko, patron d'une entreprise de blanchisserie. Un peu plus loin dans ce quartier désertique en plein développement, il y a aussi la maison de Steve et Samantha, qui auront un rôle à jouer dans cette aventure.

Tout commence le jour où Miko propose à Barnett de venir boire un verre. "Ma femme sera ravie de vous accueillir." Quelques confidences et l'ennui rapprochent les deux voisins, qui finissent par devenir amants. Une fois harponné, Barnett, empêtré dans ses problèmes d'alcool, de dettes et ses déboires post-conjugaux, se laisse entraîner dans les plans machiavéliques de Sally pour dépouiller son mari Miko.
La vérité dans le mensonge.
Voilà la trame d'un scénario digne d'un film de braquage à l'américaine. Mais là n'est pas l'essentiel, comme toujours chez Ravey. Une fois encore, l'écrivain s'attache à scruter un milieu, une géographie sociale, la personnalité de ses personnages, et les relations qu'ils nouent et entretiennent entre eux. Autant d'aspects que le romancier développe en arrière-plan, mais qui finissent par prendre le dessus, reléguant l'intrigue policière au second plan, pour mieux la faire revenir sur le devant de la scène dans les dernières lignes.
Ici le personnage principal est le narrateur. On découvre ainsi toute l'histoire de son point de vue. Mais, et c'est tout l'art narratif subtil d'Yves Ravey, le récit distille toutes sortes d'informations et d'indices glissés dans les dialogues, dans les propos repris dans le monologue intérieur, ou dans les situations. Autant d'éléments qui finissent par faire émerger, au-delà du discours du narrateur, une vérité des personnages avec un point de vue beaucoup plus objectif, beaucoup plus large. Cette narration engage l'interprétation du lecteur, qui dispose pour se faire une idée de ce que dit le narrateur, mais aussi de tout ce qui lui échappe.
"Deux choses nous rapprochaient, Sally et moi, je le savais : la fuite et l'argent"

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